« Un incendie s’est déclaré mercredi dans un hangar à Saint-Mitre-les-Remparts, dans les Bouches-du-Rhône. Par mesure de protection face aux fumées potentiellement dangereuses, une école a été confinée. » (article)
Le mot « Hangar » est couramment utilisé en allemand, mais dans un sens plus restreint qu’en français : il désigne aujourd’hui un grand bâtiment destiné à abriter toutes sortes d’engins volants : avions, hélicoptères, dirigeables (Luftschiff), navettes spatiales…
En français, par contre, sa définition est plus large : un hangar est un grand bâtiment, souvent réduit à une couverture (1), qui sert à stocker des récoltes, les fourrages, toutes sortes de matériaux, et / ou à abriter des véhicules, des aéronefs…
Le mot est attesté en français depuis le début du XIVe siècle : son usage est alors essentiellement agricole. L’allemand l’emprunte vers 1800 et l’utilise dans le domaine militaire où il désigne un abri pour les soldats, les armes et les munitions.
Ce n’est qu’avec le développement de l’aviation militaire au tout début du XXe siècle (2) que, dans les deux langues, le terme commence à désigner également un grand hall accueillant des aéroplanes et d’autres véhicules.
L’emprunt de l’allemand au français est en réalité un « prêté-rendu« , c’est-à-dire un réemprunt :
le « h » aspiré de hangar trahit d’ailleurs son origine germanique.
Le mot vient de l’ancien bas francique « haimgard« , composé
– de « haim » (« petit village », ou ensemble de bâtiments comme ceux d’une ferme, par ex. = Gehöft),
– et de « gard » (clôture / umzäunter und darum geschützter Bereich, Gehege).
« Haimgard » signifiait donc « clôture autour de la maison« .
L’allemand « Heim » (maison, foyer) et le français « hameau » (Weiler) dérivent aussi de « haim« .
De son côté, « gard » a donné naissance à « Garten« , « jardin » (4).
Le sens originel de gardo, garto, gart, n’est pas celui d’un lieu cultivé : le terme désigne d’abord la clôture qui entoure un espace où humains, animaux et cultures sont bien « gardés », puis cet espace clôturé lui-même.
En effet, garto dérive de Gerte qui désigne une vergette, un rameau flexible (de saule / Weide ou de noisetier par ex.). Entrelacées, ces petites branches souples étaient utilisées pour confectionner des clôtures, des plessis (5).
Un très long voyage étymologique entre le hangar de verre et d’acier de Redbull d’aujourd’hui et les plessis qui protégeaient les lieux habités au haut Moyen âge…
Pour être au courant
1- Le hangar (Schuppen, Lagerschuppen) est donc distinct d’une grange (Scheune) qui, elle, est fermée sur tous les côtés.
2- Les premiers hangars à avion. Au début des années 1920, quand Louis Blériot doit effectuer un atterrissage en catastrophe dans un hameau proche de Sangatte, à 8 km à l’ouest de Calais, il remise (unterstellen) son avion endommagé dans une étable pour bétail en acier appartenant au fermier du coin. Très satisfait de cet abri improvisé, Louis Blériot contacte REIDsteel, le constructeur de ce hangar agricole, et commande ses trois premiers hangars à avion.
Ce hameau de Sangatte appelé « Les Baraques (car on y avait construit des baraquements en 1624 pour abriter les pestiférés (Pestkranke) de Calais) sera rebaptisé « Blériot-Plage » en 1936, après la mort de l’aviateur, le 1er homme à avoir traversé la Manche en avion (en 1909).
3- le « h » initial de « hangar » est aspiré : donc pas d’élision de l’article (on écrit « LE hangar » et pas « l’hangar« ) ni de liaison (on prononce « un ‘hangar [ɛ̃ ɑ̃ɡaʁ] » et pas « un Nangar [ɛ̃ nɑ̃ɡaʁ] »).
4- Pour désigner le jardin il y a quelque deux mille ans, « nos ancêtres les Gaulois » romanisés utilisaient l’expression « hortus gardinus » (jardin clos). La plupart des langues européennes n’ont retenu que la deuxième partie du terme : Garten (allemand), garden (anglais), jardin (français), jardín (espagnol), giardino (italien)…
Le « hortus » latin ne subsiste plus que dans les mots apparentés à horticulture (Gärtnerei) et dans ortolan (Fettammer, Ortolan).
5- Le plessis est une haie aux branches entrelacées. Le mot vient du latin plectare (qui est apparenté à l’allemand « flechten« ) : tresser, entrelacer les branches. Cette haie « morte » (tote Hecke, Totholzhecke) s’oppose à la « haie vive » (grüne Hecke).